Glyphosate, et les méthodes agricoles alternatives

Australian LadyBird robot. Source : www.notre-planete.info © Syndney University - Licence : All rights reserved

Nicolas Hulot, le ministre français de la Transition écologique et solicaire s’opposera à la ré-approbation du glyphosate lors des prochaines discussions de l’UE les 6 et 7 octobre. Le glyphosate a été catégorisé par l’Agence Internationale pour la Recherche sur le Cancer / IARC en 2015 comme «probablement cancérogène pour l’homme (Groupe 2A)», pendant que d’autres spécialistes ont publié des rapports contradictoires sur la substance (voir : Le glyphosate jugé non cancérogène par l’Agence européenne des produits chimiques).

Si le CIRC est revenu sur leur évaluation, les doutes concernant cette substance toxique abondent. La ré-approbation par l’Union européenne de glyphosate a été reportée pour une deuxième fois en mai dernier après un désaccord entre les gouvernements membres.  Le permis actuel d’utilisation se termine en décembre. Les manifestations récentes d’agriculteurs démontrent une peur réelle face à  l’interdiction imminente du glyphosate; mais il y a peur aussi de la part du consommateur qui mange les produits issus de cette agriculture.  Et il y a l’environnement à protéger : le glyphosate imprègne les nappes phréatiques rendant toxique non seulement les produits agricoles mais aussi les cours d’eau. (Voir Glyphosate, la guerre contre les mauvaises herbes.) La France mène l’opposition au sein de l’Union européenne contre l’utilisation du glyphosate là où il existe des méthodes alternatives. Il est à noter qu’une étude menée l’an dernier par le Centre d’études biologiques du CNRS a montré que le rendement économique des céréaliers peut être substantiellement augmenté – jusqu’à 200 euros par hectare de blé – en divisant par deux la quantité d’herbicides et d’engrais azotés épandus. Les mauvaises herbes aiment l’azote. L’expérience a porté sur une zone de 450 Km2 à Chizé dans les Deux-Sèvres, et fait l’objet d’une étude depuis 1994. Lire article ici.  Même si cette étude a été présentée à 84 agriculteurs lors de sa publication, les manifestations persistent.  M. Hulot a défendu sa position en soulignant que les agriculteurs risqueraient de se trouver face à de multiples procès lorsque les gens tombent malades en raison d’une surutilisation du glyphosate. Il a souligné la nécessité de s’adapter aux nombreuses alternatives dans le secteur agricole pour lesquelles des soutiens et informations sont offerts.

Méthodes alternatives: quelles sont les options?
liquid methane unit in Ile-et-Vilaine. Source : www.aile.asso.fr
Unité de méthane liquide , Ile-et-Vilaine. Source : www.aile.asso.fr

La production d’énergie renouvelable dans le secteur agricole est encouragée par le gouvernement en vertu de la loi de juillet 2015 sur la transition énergétique pour la croissance verte, en mettant l’accent sur la production de petites chaînes de distribution pour encourager une économie circulaire. Les agriculteurs ont la possibilité de se tourner vers des activités telles que:

  1. La méthanisation. La France est en retard par rapport à d’autres pays ; l’agriculture a un rôle déterminant à jouer dans la production de gaz renouvelable qui devra atteindre son objectif de 10% de la consommation d’ici l’an 2030. Le procédé de méthanisation agricole valorise les déchets agricoles, la biomasse, et produit un digestat pouvant être utilisé comme engrais naturel organique en substitution des engrais fossiles ; il produit de l’électricité/chaleur pour le réseau local ; il réduit les émissions de gaz… – Panneaux solaires. Selon l’Institut de l’élevage, on estime que 40% des toits d’élevage de bétail nouvellement construits pourraient être aménagés avec des panneaux solaires, environ 1,2 million de mètres carrés par an, produisant 140 000 kWc.
  2. Biocarburants: Bioéthanol produit à partir de céréales, betteraves et autres produits végétaux, qui sont rajoutés à l’essence. Cependant, ce processus est mis en question puisqu’il nécessite des machines fortement polluantes, de sorte qu’une nouvelle «deuxième génération» de biocarburants qui contourne ce problème est en cours de recherche, regroupant des produits de la biomasse de cellulose qui pourraient être utilisés pour le carburant liquide – appelé éthanol cellulosique. Voir le rapport de l’Agence internationale de l’énergi Biodiesel: 7-8% du biodiesel, produit à partir d’huile végétale ou de graisse animale, est ajouté au diesel pour un carburant, conformément à la législation française actuelle, jusqu’en 2020. (Après 2020 de nouvelles réglementations seront appliquées en Europe en vertu de la Directive sur les énergies renouvelables dans le 2021- 2030: RED II.) Un nouveau carburant B10 pour moteurs diesel contenant jusqu’à 10% de biodiesel, similaire à l’E10 que nous voyons déjà pour l’essence, est à l’étude.
    Hemp absorbs toxics from the soil; can be used as a biofuel as well as for textiles and construction
    Le chanvre nettoie les toxiques dans le sol. Il peut être utilisé comme biocarburant et sert aussi dans l’industrie du bâtiment

    La production de biocarburants a également permis à la France d’augmenter sa production de protéines végétales en tant qu’aliments pour animaux.

  3. Notez que le chanvre, qui peut être utilisé comme biocarburant sert aussi dans la construction : il nettoie également les pesticides, les métaux toxiques, les solvants et l’essence présents dans le sol (voir l’étude scientifique réalisée à Tchernobyl après la catastrophe nucléaire de 1986).
  4. D’autres nouvelles méthodes agricoles pour contourner l’utilisation de pesticides toxiques peuvent être consultées ici.

Si les combustibles fossiles doivent être chose du passé, ils doivent être remplacés par de nouveaux produits issus de la biomasse. À condition que la recherche sur l’innovation soit maintenue et que les agriculteurs reçoivent toute l’aide et formation requise (voir ci-dessous), ces pratiques pourraient compléter leur revenu ou leur permettre de passer entièrement à de nouvelles activités agricoles favorables pour l’environnement.  Ces nouvelles pratiques contribueront au Plan nationale de programmation pluriannuelle de l’Energie (PPII). La peur que souffrent les agriculteurs du changement, la peur de tenter une nouvelle voie dans le secteur, est aggravée par la pression des syndicats qui, eux, voient leur pouvoir politique diminuer* Au même temps il semblerait que la jeune génération d’agriculteurs s’adaptent bien aux nouvelles méthodes agricoles et à l’innovation, en particulier à la bio-agriculture, en plein essor. (Voir Bio-boom en France).

Mais en face à cette peur, il y a des solutions :

  • Agridiff, dont les détails sont disponibles en ligne sur le portail gouvernemental de la fonction publique. Agridiff offre un diagnostic de la ferme et sa faisabilité, un plan de relance et un suivi.
  • Le MSA offre un soutien administratif et consultatif, et une aide psychologique.
  • L’ADEME/ l’Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie offre de l’aide administrative, financière et de la recherche pour des projets favorisant un environnement plus propre.
  • Les chambres régionales de l’agriculture (par exemple, la Chambre d’agriculture de Normandie) offrent de l’aide financière et consultative, bien que le ministre de l’Agriculture ait récemment annoncé que l’aide existante pour maintenir de nouvelles fermes bio diminue, en faveur du financement de nouvelles conversions non seulement à la bio mais à d’autres types d’agriculture qui respectent l’environnement. La responsabilité de la répartition de cette aide est partagée entre l’État et les Régions, ce qui prête à beaucoup de confusion.
  • L’association indépendante Solidarité Paysans offre de l’aide aux agriculteurs en difficultés, donnée par les spécialistes bénévoles et salariés, et regroupe des agriculteurs de 64 départements.
Robot LadyBird australien. Source : www.notre-planete.info © Syndney University – Licence : Tous droits réservés.

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*Notez que seulement 8% des travailleurs en France appartiennent à un syndicat ;  la nouvelle législation donne plus de pouvoir aux entreprises sur leur effectif, ainsi contournant les syndicats. Voir: Le biogaz en France et les élections présidentielles Le gâchis, le fumier et le digesteur Glyphosate : guerre contre les mauvaises herbes